dimanche 26 juillet 2015

Wattpad

Pour ceux qui s'ennuient, ou voudraient simplement se mettre à l"écriture et trouver un public, on peut rejoindre Wattpad, un café littéraire en ligne. Basé à Toronto, et soutenu par des firmes d'investissement New-Yorkaises, on n'a qu'à s'y joindre pour participer. Le Figaro semble penser que c'est un site adolescent; peut-être pas...

 
https://www.wattpad.com/signup

lundi 20 juillet 2015

Vaccin cancer

Étonnant; Cuba aurait mis au point un vaccin contre le cancer du poumon. Pas vraiment un vaccin au sens conventionnel, qui empêcherait la maladie de se développer, ce produit s'adresse aux personnes déjà atteintes. Il ralentit la propagation à d'autres endroits du corps, car il s'attaque à la protéine nourricière sur l'enveloppe d'une cellule en métastase. Une simple injection, une fois par mois, et l'espérance de vie de la personne malade augmente de façon dramatique. Voir:

lundi 13 juillet 2015

Bon 14 Juillet 2015

C'est un peu triste: il n'y aura pas de garden-party en France cette année pour marquer
le 14 juillet, austérité oblige. On se souvient  quand même de celui de Nicolas Sarkosy avec 7 000 invités et une facture de 1 million$. Voilà pour les voeux, en une année difficile avec Charlie Hebdo
et les diverses crises .


https://22tracks.com/par/top22/64603

lundi 6 juillet 2015

Varoufakis (marxisme)


source: The Guardian, February 18, 2015

traduction: GrosseFille

Yanis Varoufakis: Devenir un marxiste mécréant

Avant d’entrer en politique, Yanis Varoufakis, le ministre des finances
grec iconoclaste au centre de la dernière confrontation au sein de
l’Eurozone, a produit cet exposé chauffé à bloc du capitalisme européen
et suggestion d’apprentissage possible à partir des erreurs de Marx lui-même.

En 2008, le capitalisme a connu son deuxième spasme mondial. La crise
financière a declenché une spirale vers le bas qui ne cesse à ce jour. La
situation actuelle de l’Europe ne pose nullement problème que pour les
travailleurs, les démunis, les banquiers, les classes sociales ni même, les nations. 
Non, la déconfiture actuelle de l’Europe met en péril la civilisation telle que
nous la connaissons.

Si mon pronostic s’avère juste, et nous ne nous buttons pas qu’à une simple
descente cyclique vite remontée, la question pour les penseurs de gauche
devient la suivante: devrions-nous acceuillir cette crise au sein du capitalisme 
européen comme opportunité pour un remplacement par un meilleur système?
Ou devrions-nous à contrario nous en préoccuper au point d’initier
une campagne de stabilisation du capitalisme européen?

À mon avis, c’est clair. La crise européenne a moins de chance de mener à un alternative meilleure au capitalisme que de déclencher des forces régressives
de grand danger qui auraient la capacité de causer un bain de sang humanitaire,
tout en détruisant tout espoir de percées pour des générations à venir.

Cette opinion me vaut, de la part de penseurs bien intentionnés, la critique
d’être d’attitude vouée à la défaite et d’essayer de sauver un système européen
socioéconomique somme toute intenable. Ça fait mal parce que il y a là
vérité.

J’accepte l’idée que cette union européenne se bâtit sur un large déficit démocratique
qui, de main avec une architecture faussive d’union monétaire, laisse les peuples de
l’Europe en situation de récession permanente. Et je m’incline aussi à la critique que j’ai pu faire campagne sur une plateforme découlant de la supposition que la gauche était, et resterait, carrément vaincue. J’admets d’emblée que j’aimerais mieux promouvoir
un jeux de politiques, en vue de remplacer le capitalisme européen.

Pourtant j’insiste ici sur une fenêtre laissant deviner un capitalisme européen répugnant à souhait, dont la fracture, malgré ses maints défauts, doit à tout prix être évitée.
Voilà une confession afin de convaincre la gauche que nous avons une mission contradictoire: arrêter la chute dans le vide du capitalisme européen afin de
pouvoir se permettre de formuler une alternative.


Pourquoi marxiste?

Appelé à choisir un sujet de thèse de doctorat, en 1982, j’ai choisi tout-
-à-fait délibérément un sujet hautement mathématique là sans influence
marxiste. Quand, plus tard, j’oeuvre comme enseignant, dans des facultés
d’économie d’orientation dominante, le contrat implicite avec mes employeurs
stipule des théories économiques non-marxistes. Vers la fin des années 80, la
faculté d’économie de l’université de Sydney m’offre un poste en alternative à
un enseignant de gauche (je ne le savais pas à l’époque).

À mon retour en Grèce en l’an 2000, je m’allie au futur premier ministre Georges Papandreou, dans l’espoir de halter une droite résurgissante visant à pousser la Grèce vers la xénophobie à la fois à l’interne et dans les relations extérieures. Tous le savent
maintenant, le parti Papandreou n’a non seulement failli dans l’arrêt de la xénophobie mais, éventuellement, a su présider à des politiques macroéconomiques  néolibérales les plus virulentes qui ont poussé la Zone Euro aux plans d’aide et ainsi, 
ramené les Nazis sur les rues d’Athènes. Je me suis retiré comme conseiller envers
Papandreou en 2006, et suis devenu la critique la plus acerbe de ce gouvernment et
la mauvaise gestion de l’implosion grecque post-2009 et même là, sans jamais
la moindre ombre de marxisme dans mes propos.

À cette sortie de situation, certains demanderont pourquoi il m’importe de
m’identifier marxiste. Ainsi, en vérité, je dois à Marx la perpective sur le monde dans lequel nous vivons, de mon enfance à ce jour. Ce n’est pas ce que j’avance volontiers
en société car la moindre mention de Marx serait anathème. Mais je nie rien. Après
plusieurs années de contact avec un public avec qui je ne partage aucune idéologie, je ressens le besoin de confier la facture de Marx sur mes idées. Et d’expliquer que, marxiste sans réserve, j’estime aussi qu’il est important de lui résister passionnément 
à certains égards. D’être, en termes clairs, marxiste mécréant.

Toute ma carrière d’enseignant s’est passée de Marx, et on ne peut guère considérer mes prescriptions économiques de marxistes, alors pourquoi vouloir parler de Marx
maintenant? La réponse est pourtant simple: mes préceptes économiques non-marxistes découlent d’une façon de voir qui elle l’est.

Un penseur de gauche peut s’en prendre à la pensée économique dominante de deux façons, il m’a toujours semblé. La première par une critique de surface. Accepter les axiomes de la pensée dominante et mettre à nu ses contradictions internes. Dire: «Je
ne critique en rien vos prémisses mais voici pourquoi vos conclusions ne s’ensuivent pas.» C’est ainsi que Marx lui-même procédait en ce qui a trait à l’économie polique britannique. La seconde possibilité pour un penseur de gauche revient, bien sûr, à présenter des théories autres que celles des milieux établis, dans l’espoir d’être pris au sérieux.
Ma réponse à ce dilemne en revient à l’idée que les ayants ne sont jamais
perturbés par des théories découlant de prémisses autres que les leurs.  La seule chose qui puisse déstabiliser et véritablement porter atteinte à la pensée économique néoclassique dominante serait une démonstration de l’incohérence logique des
modèles en jeu. C’est pour cette raison que j’ai opté, dès le départ, de me pointer
vers le coeur même de la théorie néoclassique et de ne pas m’investir dans l’effort
d’une description marxiste du capitalisme. Mes raisons, donc, étant elles-mêmes marxistes. 

Appelé à commenter ce monde dans lequel nous évoluons, je n’avais d’autre alternative que de m’en remettre à la tradition marxiste qui avait formé ma pensée depuis que mon 
père métallo m’avait fait comprendre, encore enfant, la répercussion de l’avancée technologique sur l’histoire. Comment, en example, le passage de l’ère de bronze à l’ère de métal a pu accélérer l’histoire; comment la découverte de l’acier a déculper le
moment historique; et comment les technologies de l’information à base de silicone
exarcèbent les discontinuités socioéconomiques et historiques.

J’ai fait mes premières lectures de Marx bien jeune, résultat des temps étranges
où j’ai grandi, dans une Grèce sortant de la cauchemardesque dictature néofaciste
de 1967-74. Ce qui m’a attiré chez Marx fût son génie enjoleur pour produire 
un scénario dramatique de l’histoire humaine, voire pour la damnation humaine, 
toutefois comprenant aussi la possibilité de salut et d’une authentique spiritualité.

Marx a su créer un narratif populé de travailleurs, capitalistes, bureaucrates et
scientifiques qui formaient les dramatis personae de l’histoire. Ils se débattent afin de dompter la raison et la science pour le bien de l’humanité tandis que, contrairement à leur intention, des forces démoniaques s’élèvent de leurs efforts pour usurper et subvertir leur propre liberté et humanité.

Cette perspective dialectique, là ou toute chose contient le germe de son contraire, et cet oeil opportuniste avec lequel Marx discerne un potentiel de changement dans ce qui semble le moins changeant des structures sociales, m’ont aidé à bien saisir les contradictions de l’ère capitaliste. Ceci dissout le paradoxe d’une époque qui a fait apparaître une énorme richesse et, dans le même souffle, une épouvantable pauvreté. 
Aujourd’hui si on se penche sur la crise européenne, la crise aux États Unis et la stagnation à long terme du capitalisme japonnais, la plupart des commentateurs se buttent à reconnaître le processus dialectique à l’oeuvre. Ils perçoivent bien les montagnes de dettes et pertes banquaires mais négligent l’envers de cette même médaille: l’accumulation d’épargne gelée par la peur et donc en faille de conversion en
investissements productifs. Une vigilance marxiste pour les oppositions binaires auraient pu leur ouvrir les yeux.

Une cause majeure de l’incapacité de l’opinion dominante à venir à bout de la réalité contemporaine repose sur le refus de voir la dialectiquement contractée ‘production conjointe’ de l’endettement et des surplus, de la croissance et du chômage, de la richesse et de la pauvreté, même du bien et du mal. Le scénario de Marx sonne l’alerte 
du fait que nous tenons là la source de la ruse de l’histoire.

À partir de mes premiers pas de pensée en tant qu’économiste, à ce jour, il m’est venu que Marx a fait une découverte qui doit demeurer centrale à toute analyse utile du capitalisme. C’était la découverte d’une autre opposition binaire au coeur du travail humain. Entre les deux natures bien différentes du travail: i)le travail en tant qu’activité créateur de valeur que l’on ne peut jamais quantifier à l’avance ( et se voit donc impossible à assimiler à une marchandise), et ii) le travail en tant que quantité (par exemple, nombre d’heures travaillées) qui serait à vendre et à un prix convenu. C’est ce qui distingue le travail d’autres composantes telle l’électricité: sa nature double, contradictoire. Une distinction-cum-contradiction que les économistes politiques ont négligée avant Marx et que les economistes dominants refusent de reconnaître aujourd’hui. 

Le travail et l’électricité peuvent être tous deux vus comme marchandise. De fait,
les employeurs et les les travailleurs s’évertuent à rendre le travail en marchandise. Les patrons usent de leur ingéniosité, et de celle de leurs subbies aux resources humaines
afin de quantifier, mesurer et rendre homogène le travail. Pendant que, les employeés aspirants se tordent anxieusement essayant de rendre marchandise leur capacité de travail, fignolant leurs résumés pour se présenter porteurs de d’unités de travail quantifiables. Et voilà le malheur. Si les travailleurs et les employeurs venaient à s’entendre sur une mise en marchandise complète du travail, le capitalisme périrait. 
C’est là une constatation sans laquelle la tendance du capitalisme à produire des crises demeure incompréhensible et, aussi, une idée qui requiert quelque connaissance de la pensée marxiste. 

  • * *

Quand la science fiction devient vérédique

Dans le classique du cinéma d’anticipation de 1953 Invasion of the Body Snatchers, la force extraterreste ne nous attaque pas de front, contrairement à, disons, le War of the Worlds de HG Wells. En fait, les gens sont conquis de l’intérieur, jusqu’à la dissolution de leur humanité et émotions. Les corps ne sont plus que des coquilles qui jadis arbritaient une volonté mais qui aujourd’hui travaillent, vivent mécaniquement le  quotidien, et présentent un simulacre humain libéré de l’essence inquantifiable de l’être.
Ceci pourrait resembler à  une situation où le travail humain devient capital humain et donc, compatible avec le vulgaire schema de la modelisation économique.

Toute théorie non-marxiste qui prend pour acquis que les composantes humaines et nonhumaines de la production sont interchangeables suppose que la deshumanisation du travail est bouclée. Mais si ceci était le cas, le résultat serait la fin du capitalisme en tant que système apte à créer et distribuer de la valeur. En premier lieu, la société d’automates déhumanisés resemblerait à une montre mécanique composée de
pièces et ressorts, à chacun sa fonction, le tout produisant un ‘bien’: l’heure juste.
Mais dans une société formée que d’automates, l’heure juste ne serait pas un ‘bien’.
Il y aurait là certes un ‘rendement’ mais pourquoi un ‘bien’? En l’absence d’une réelle expérience humaine de la fonction de l’horloge, il ne peut y avoir ni ‘bien’ ni ‘mauvais’.

Si jamais le capital réussit à quantifier, et finalement complètement marchandiser, le travail, tel qu’il essaie constamment de le faire, se verra aussi disqualifier cette insondable, récalcitrante liberté humaine à l’intérieur du travail qui permet la création de valeur. L’éclatante perspicacité de Marx sur l’essence des crises capitalistes étant
pertinemment celle-ci: plus le capitalisme réussit à rendre le travail marchand le moins de valeur s’attache à chaque unité de rendement généré, le plus bas le taux de profit et,
éventuellement, le plus près une prochaine récession de l’économie en tant que système. L’interprétation de la liberté humaine comme catégorie économique ne se rencontre que chez Marx, rendant possible une perspective distinctement dramatique et particuliairement aigue de la propensité du capitalisme à trouver la récession, voire la dépression, dans un moment de croissance.

À l’écriture que le travail représente le vivant, feu formatif; que les choses sont transitoires; ancrées dans le temps; Marx apportait ainsi la plus importante contribution d’un économiste à notre compréhendion de l’aigue contradiction cachée dans l’ADN
du capitalisme. Quand il décrit le capital comme «...force devant laquelle il faut se soumettre...qui développe une énergie cosmopolite, universelle qui se défait de toutes les limites et de tous les liens et se porte comme la seule politique, la seule universalité la seule limite et le seul lien», il rend évident que le travail peut être acheté par le capital liquide (ie l’argent), dans sa forme marchande, mais qu’il gardera aussi une volonté hostile à l’acheteur capitaliste dans son sein.  Mais Marx ne se contentait pas d’une formulation psychologique, philosophique ou politique. Il apportait, plutôt, une analyse remarquable de pourquoi le moment que le travail (en tant que activité inquatifiable) se
défait de cette hostilité, il devient stérile, incapable d’apporter toute valeur.

Au moment où les néolibéraux réussissent à retenir la majorité dans leurs tentacules théoriques, régurgitant incessament l’idéologie de l’augmentation de la productivité du travail dans l’espoir d’améliorer la compétitivité afin de nourrir la croissance etc, l’analyse de Marx propose un sérieux antidote. Le capital ne peut jamais gagner dans sa lutte pour transformer le travail en une composante infiniment élastique et mécanique, sans s’autodétruire. Voilà ce que ni les néolibéraux ni les Keynésiens n’arrivent à comprendre. «Si la classe entière des travailleurs salariés venaient à disparaître au profit de la machinerie» écrivait Marx, « comment terrible ce serait pour le capital, qui, sans travail salarié, cesse d’être capital!»

Quelle contribution pour Marx?

Presque toutes les écoles, en économie, y compris celles d’économistes d’avant-garde,
aiment bien faire croire que, quoique Marx fût un penseur notable, bien peu de sa contribution ne reste d’actualité. À mon humble avis, non. En plus d’avoir cerné le drame fondamental de la dynamique capitaliste, Marx me donne aussi les outils pour demeurer en retrait de la propagande toxique du néolibéralisme. Par exemple, l’idée que la richesse est le fruit d’une production privée ensuite appropriée par un état quasi-illégitime, par le biais de l’impôt, peut séduire si on n’a pas d’abord connu l’argument poignant de Marx que c’est précisément le contaire qui s’applique: la richese est production collective ensuite appropriée dans le privé par des relations sociales de production et de propriété basées, pour leur conduite, presque entièrement sur
une conscience faussée. 

Dans son récent livre Never Let a Serious Crisis Go to Waste, l’historien de la pensée en economie, Philip Mirowski, nous présente le succès des néolibéraux à convaincre plusieurs que les marchés ne sont pas que des moyens, mais bien des fins en soi. 
Cette notion revient à l’idée que ni l’action collective ni les institutions publiques ne savent trouver des solutions, tandis que les opérations libres d’intérêts privés guarantissent non seulement les bons résultats mais aussi les meilleurs désirs, caractères, morales même. L’ultime exemple de ce type de grossièreté néolibérale
porte sans doute sur comment gérer le changement climatique. Les néolibéraux
ont forcé l’argument que, s’il faille faire quelque chose, ça en revient à la création de quasi-marchés pour les ‘indésirables’ (donc, un régime de marché des émissions), car seuls les marchés savent départir les désirables des indésirables. Pour comprendre
pourquoi une telle solution de quasi-marché est vouée à l’échec et, plus important, d’où nous vient une telle ‘solution’, on peur faire pire que de regarder la logique d’accumulation du capital  tracée chez Marx et adaptée à un monde d’oligopolies
en réseau par l’économiste polonais Michael Kalechi.

Au cours du 20ième siècle, les deux courants politiques qui ont pris racine dans le marxism sont le communisme et la social-démocratie. Les deux, en plus de leurs autres erreurs (et, éventuellement, crimes) ont failli, à leur grand dam, de suivre le tracé de Marx sur une question centrale: au lieu de centrer leurs slogans et concepts organisateurs sur la liberté et la raison, ils ont opté pour l’égalité et la justice, laissant ainsi le concept de liberté aux néolibéraux. Marx ne flanchait pas: la faiblesse du capitalisme ne vient pas que c’est injuste mais irrationnel, et condamne joyeusement des générations à la privation et au chômage et transforme même les capitalistes en automates névrotiques, vivant dans la peur permanente qu’à moins de transformer leurs compagnons humains pleinement en marchandises afin de mieux servir le capital, ils cesseraient d’être capitalistes. De ce fait, si le capitalisme apparaît injuste c’est qu’il réduit tout un chacun à la condition d’esclave; qu’il engendre un gaspillage des ressurces humaines et naturelles; que la même ligne de montage qui produit des
trucs remarquables et une folle richesse, produit aussi un profond mal-être et des crises.

Ayant refusé de présenter la critique du capitalisme en termes de liberté et de raison, que Marx croyait essentiel, la social-démocratie et la gauche en général ont permis aux néolibéraux de s’emparer du blason de la liberté et de triompher de façon spectaculaire dans la compétition des idéologies.

L’aspect le plus marquant du triomphe néolibéral tient sûrement à ce qu l’on nomme le ‘déficit démocratique’.On a pleuré des rivières de larmes de crocodile sur le déclin des grandes démocraties au long des dernière trois décennies vouées à la finance et la globalisation. Marx pourrait bien rire de ceux qui semblent surpris, ou offusqués, par le ‘déficit démocratique’. Quel était le grand objectif du libéralisme au 19ième siècle? Bien sûr, et marx nous l’a répété, il s’agissait de séparé la sphère économique de la politique et enclaver la politique laissant ainsi l’économie au capital. C’est l’étonnant succès du libéralisme à cet égard que nous observons présentement. Voyons l’Afrque du Sud d’aujourd’hui, plus de vingt ans après la libération de Nelson Mandela et la sphère politique, enfin ouverte à toute la population. La difficulté du Cnf étant que, pour avoir la permission de dominer le politique, il devait abonner l’économie. Et si vous pensez autrement, considérons les douzaines de mineurs abattus par des gardiens
à la solde de leurs employeurs parce qu’ils ont eu la témétrité  d’exiger des hausses de salaire.

Comment mécréant?

Voilà le pourquoi de ma compréhension de notre monde social découle de Marx, mais je n’en demeure pas moins terriblement fâché à son égard. En d’autres termes. il me reste à montrer comment je suis  marxiste qu’à mes heures, mécréant. Marx aurait commis deux grandes erreurs, une d’omission et une de commission. Aujourd’hui même, ces erreurs compromettent l’efficacité de la gauche, surtout en Europe.

La première erreur marxiste revient à ne pas avoir prévu l’effet de la théorie marxiste
sur le monde qu’elle commentait. Voilà une théorie extrêmement puissante en description. Mais n’a-t-il su voir venir que ses disciples, gens qui maîtrisaient ces idées
mieux que le travailleur moyen, pourraient s’en servir pour abuser de leurs camarades, mettre en place des structures aptes au pouvoir, accéder à des postes d’influence?

La deuxième erreur, que je qualifierais de commission, fût pire. C’est le pris pour acquis que la vérité du capitalisme peut s’exhiber dans les mathématiques de ses modèles. Voilà pour lui le pire ennemi de ses propes perçées théoriques. L’homme qui nous donna la liberté humaine comme concept économique de premier ordre; le savant qui proposa l’indétermination la plus radicale proprement évoquée pour l’économie politique; ce même homme joue avec des modèles algébriques simplistes, où les unités de travail, s’il s’en faut, se voient pleinement quantifiées, espoir à tout prenant de faire ressortir de ces équations le coup de grâce du capitalisme. Après sa mort, l’effort marxiste en économie usa bien des carrières sur ce même type de mécanisme
scholastique. Perdus dans des débats futiles portant sur le dit problème des transformations et comment s’y adresser, ses émules devinrent éventuellement
une espèce en voie de disparition, au moment où l’avancée néolibérale écrasait tout sur son passage.

Comment Marx a-t-il pu se tromper ainsi? Comment ne pas reconnaître qu’aucune vérité sur le capitalisme peut venir d’un modèle mathématique, à concepteur
magicien? N’avait-il pas les outils intellectuels pur comprendre que la dynamique capitaliste est fruit de la partie non-quantifiable du travail humain; ie à partir d’une variable qui ne plie jamais à une définition précise? Bien sûr que si, ce sont ses propres outils. Non, ce qui soustend cette erreur est plutôt sinistre: tout comme le vulgaire économiste qu’il réprimande ( et qui dominent les universités aujourd’hui), il recherchait
le pouvoir qu’une ‘preuve’ pouvait apporter.

Si j’ai raison, Marx savait bien ce qu’il faisait. Il comprenait, ou avait la capacité de savoir, qu’une théorie compréhensive de la valeur ne peut se trouver dans l’enceinte du modèle mathémathique d’une économie capitaliste. Il savait, je n’en doute aucunement, qu’une véritable théorie sur l’économie doit respecter l’idée que les règles de l’indéterminé seront elles aussi indéterminées. En termes économiques ceci revient à dire que le pouvoir du marché, et ainsi la profitabilité des capitalistes ne se réduit pas à leur capacité à extraire un travail de leurs employés; que certains capitalistes sauront extraire plus d’un bassin de travailleurs ou d’un groupe de consommateurs pour des raisons externes aux théories de Marx.

Mais voilà, cette façon de voir reviendrait à accepter que ses ‘lois’ ne sont pas immuables. Il aurait à concéder à des voix autres venant des syndicats que ses théories étant indéterminées, ses prononcements ne pouvaient faire l’unanimité. Ils étaient provisionnels en permanence. Cet entêtement à offrir le total, fermé, histoire close, ou modèle, le mot de la fin, a là quelque chose que je ne peux pardonner à Marx. Ceci causa, après tout, pas mal d’erreur et, plus important, emmena l’autoritarisme. Les 
erreurs et l’autoritarisme qui sont largement responsables pour l’impuissance actuelle de la gauche en tant que force pour le bien et rempart face aux abus de la raison et liberté que les forces néolibérales imposent aujourd’hui.

Lesson du thatcherisme

J’ai rejoint l’Angleterre pour poursuivre mes études universitaires en septembre 1978, à six mois de l’élection de Margaret Thatcher qui allait changer les chose à tout jamais. La vue du gouvernement travailliste qui se défaisait, sous le poids d’un programme social-démocrate dégénéré, m’a conduit à une sérieuse erreur: l’idée qu’une victoire Thatcher pouvait avoir du bon, car donnant aux classes travaillistes et moyennes britanniques le petit électrochoc nécessaire au renouveau de la politique progressiste; donc donnant à la gauche la chance de mettre sur pied un agenda radical propre à un nouveau type de politique progressiste gagnant.

Le chomâge double et triple, sous les interventions néolibérales de Thatcher, et je continue d’espérer que Lenin avait raison: «Les choses doivent empirer avant de s’améliorer». C’est méchant, brutal, et pour certains, dangereux, et l’idée me vient que je fais une erreur tragique: les choses peuvent empirer à perpétuité, sans amélioration. L’espoir qu’un effritement des bien publics, une diminution de vie pour la majorité, une montée de la misère dans tous les recoins de la nation devrait, automatiquement mener à un réveil de la gauche n’était que ça: un espoir.

La réalité, par contre, fut brutalement différente. Avec chaque nouveau tournant de récession, la gauche devenait plus timide, moins capable de proposer des idées valides et, pendant ce temps, la classe travailliste se divisait entre ceux qui abandonnaient la société et ceux qui se convertissaient au néolibéralisme. Mon espoir que Thatcher puisse occasionner une révolution politique était franchement chimérique. Ce que le thatcherisme légua fut une financilisation extrême, la victoire du centre commercial sur le magasin du coin, un marché immobilier fétishiste et Tony Blair.

Au lieu de radicaliser la société britannique, la récession si savamment entretenue par le gouvernement Thatcher, partie prenante d’une guerre de classe contre le syndicalisme et des mesures de sécurité sociale et redistribution établies dans l’après-guerre, a détruit en permanence la possibilité d’une politique radicale, progressiste en Grande Bretagne. Et ce, elle a même détruit que l’on puisse considérer des valeurs autres que le ‘juste prix’.

La lesson que Thatcher m’a donné sur la capacité d’une longue récession à saper la politique progressiste, est une qui m’accompagne aujourd’hui dans cette crise européenne. De fait, c’est le déterminant majeur de ma prise de position en relation à cette crise. C’est aussi la raison pour laquelle je me confesse joyeusement du péché dont  mes critiques de gauche m’accusent: le péché de ne proposer aucun programme radical qui exploite la crise afin de démanteler le capitalisme européen, de briser cette affreuse zone euro, de miner l’union européenne des cartels et banquiers.

Bien sûr, j’aimerais bien proposer un tel agenda. Mais, je ne commetterai pas la même erreur deux fois. Qu’avons-nous accompli en Grande Bretagne au début des années 80
à promouvoir une agenda socialiste que la société refusait tout en tombant tête première dans le traquenard néolibéral thatcheriste? Rien. Qu’accomplirons-nous en demandant la fin de la zone euro, de l’Union Européenne, quand le capitalisme européen fait de son mieux pour le miner, l’Union Européenne, voire lui-même?

Un départ grecque, portuguais ou italien de la zone euro déclencherait une fragmentation du capitalisme européen, donnant un sérieux surplus apte à créer une récession à l’est du Rhin et au nord des Alpes, et le reste de l’Europe sombrerait dans une stagflation insoutenable. A qui profiterait un tel scénario? Une gauche salvatrice
se levant tel le Phénix sur les cendres des institutions européennes? Plutôt les Nazis
des temps nouveaux, et néofascistes divers, les xénophobes et les fraudeurs? Je n’ai aucun doute sur l’appartenance de cette désintégration de la zone euro.

Il ne me revient pas d’encourager cette version postmoderne des années 1930. Si ceci a pour conséquence que la sauvegarde du capitalisme deviendra l’oeuvre des marixtes mécréants, ce sera ainsi. Pas par amour pour le capitalisme européen, pour la zone euro, pour Bruxelles, ou la Banque centrale européenne, mais tout simplement pour minimiser la souffrance humaine inutile de cette crise.

Le que faire marxiste

Les élites de l’Europe se comportent aujourd’hui comme si elles ne comprenaient ni la nature de la crise à laquelle elles président, ni ses implications pour l’avenir de la civilisation européenne. Dans un réflexe d’atavisme, elles choississent de piller les resources compromises des faibles et des dépossédés afin de colmater les énormes
trous du secteur financier, et refusent d’admettre l’impossibilité de la tâche.

Avec comme donne le fait des élites en dénit et désaccord, la gauche doit tout de même admettre que nous ne sommes pas en mesure de réparer le vide laissé par
la défaillance du capitalisme européen à la faveur d’un socialisme fonctionnel. Notre
tâche est alors double. Premièrement, offrir une analyse de la situation actuelle où les non-marxistes, Européens de bonne volonté séduits par le néolibéralisme, puissent s’y retrouver. En deuxième lieu, accompagner cette saine analyse de recommendations pour la stabilité de l’Europe - mettant fin à la descente en spirale qui, à la fin, ne sert
que le sectarisme.

Je conclus donc avec deux confessions. Premièrement, si je suis heureux de défendre
comme étant authentiquement radical la poursuite d’un agenda modeste visant la stabilité d’un système que je critique, je ne prétendrai à aucun entousiasme. Voilà ce que nos avons à faire, dans les circonstances actuelles, mais je m’attriste à savoir que je ne verrai sûrement jamais un agenda plus extrême voir le jour.

Finalement, dans une note personnelle, je sais qu’il est risqué de remplacer un sentiment d’avoir réussi à la tâche par une satisfation d’être accepté dans la bonne société. J’ai bein connu, à l’occasion, ce sentiment de plaisir à être fêté. Et comment
non-radical, laid, corruptif et corrosif ce fut. 

L’expérience du nadir me vint dans un aéroport. J’étais sommé de donné une allocution sur la crise économique par un organisme bien nanti me payant un billet première classe. Rentrant à la maison, épuisé de plusieurs transfers, je dépasse plusieurs passagers en mode économie à la sortie. Et je me rends compte, à mon horreur, comment facile cela peut être d’être infecté par la notion qu’on mérite bien un privilège. 
Je me suis souvenu de ce que chacun à gauche comprend bien: que rien ne se reproduit aussi aisément qu’un faux sentiment de mérite. Se faire des alliances chez les forces réactionnaires, nécessaire pour stabiliser l’Europe d’aujourd’hui, nous met à risque de la cooptation, de se départir de notre radicalisme au profit de la chaleureuse
sensation d’être membre des cercles du pouvoir. 

Savoir se confesser demeure sans doute le dernier antidote pragmatique à la dérive vers son contraire. Il nous faut forger des alliances mais éviter de devenir de ces socialistes qui n’ont qu’amélioré leurs propres circonstances. L’astuce en vient à contourner les extrêmes révolutionnaires qui, somme toute, aident les néolibéraux à contourner toute opposition à leurs politiques auto-destructrices tout en gardant en vue les failles du capitalisme,  en essayant de le sauver, pour des raisons stratégiques, de lui-même.









  



dimanche 5 juillet 2015